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Quel Premier ministre pour François Hollande?

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Alors que toute la classe politique, y compris la majorité, estime indispensable de changer de Premier ministre, la question qui se pose aujourd'hui est celle de savoir s'il doit en changer et qui peut prétendre accéder à l'Hôtel Matignon....

Le président de la République y semble très fortement incité, y compris par les Français qui, très majoritairement, sont demandeurs de ce point de vue.

Cependant un changement de Premier ministre ne saurait se réduire à une sorte de rapiéçage d'un équipement usé.

Un nouveau premier ministre : un message politique fort

Un changement de Premier ministre doit être une action purement réfléchie : pourquoi en changer, ce qui suppose un constat et une lucidité politiques sans fard, et dans quelles perspectives politiques ?

Toutes les raisons sont bonnes pour justifier le changement de Premier ministre ; mais il ne faut jamais oublier que cela dépend d'un acteur avant tout, de sa personnalité et des circonstances du moment: le chef de l'Etat.

LIRE AUSSI: Remaniement, le troisième tour des municipales


Dans l'histoire de la Ve République, les changements de Premier ministre ont différentes causes trouvant souvent leur origine dans une mésentente entre le Président et son Premier ministre plus que pour un changement de politique. Lorsque Maurice de Murville succède à Georges Pompidou à l'hôtel Matignon en juillet 1968, c'est parce que le Premier ministre ne bénéficiait plus de la confiance du général de Gaulle. Il venait pourtant de remporter brillamment les élections législatives à la suite des évènements de mai 1968... En choisissant un fidèle parmi les fidèles, un homme discret venu de la diplomatie, le général De Gaulle signifiait à tous qu'il entendait terminer son mandat sans ennui avec le gouvernement.

En choisissant Pierre Messmer pour mettre un terme au bail de Jacques Chaban-Delmas à Matignon en juillet 1972, Georges Pompidou signifiait au premier qu'il n'entendait pas se faire doubler sur les initiatives politiques, le projet de "nouvelle société" présentée par Jacques Chaban-Delmas ayant été vécu comme une immixtion sur les plates-bandes du Président qui seul peut avoir, sous la Ve République, une vision politique.

Il en est allé de la même façon par la suite: Jacques Chirac quitta avec fracas l'Hôtel Matignon en 1976 en désaccord avec le président de la République; en choisissant Raymond Barre, "meilleur économiste de France" en 1976, Valéry Giscard d'Estaing fit prévaloir la compétence sur le politique. Puis, sous François Mitterrand, un fidèle allié, Pierre Mauroy succédait à Raymond Barre. Ce qui n'empêcha pas le Président, par réalisme politique, après les manifestations monstres en faveur de l'enseignement catholique de 1984, de déloger ce fidèle pour installer à Matignon "le plus jeune Premier ministre de France". Deux ans après, la droite revenait au pouvoir dans une période inédite de cohabitation.

Le Premier ministre: un fusible bien utile

Il y eut des périodes agitées aussi: Michel Rocard, alors dénommé "le génie des carpettes", ne put surmonter la forte hostilité de François Mitterrand à son égard; lui succéda alors une période chaotique de quelques mois avec Edith Cresson à qui succéda un autre fidèle, Pierre Bérégovoy.

Changer de Premier ministre peut donc s'expliquer pour des raisons plus objectives liées à la situation politique, lorsqu'il est nécessaire de changer de cap. Le Premier ministre joue alors pleinement son rôle de fusible.

Il en va ainsi avec François Hollande. En nommant Jean-Marc Ayrault à Matignon, il s'agissait avant tout de s'assurer de la nomination à ce poste d'un responsable politique qui ne contesterait en aucune façon son autorité et qui connaissait bien les rouages de la vie parlementaire. Tout le monde l'avait compris ainsi.

Le problème est de savoir si aujourd'hui, ce profil "colle" encore à la présente période où les Français exigent qu'un responsable politique tienne le cap politique clairement défini. Un président de la République tout en fixant les grandes orientations politiques, a besoin d'un chef d'orchestre pour mettre en musique cette politique. Incontestablement, le Premier ministre doit donc jouer pleinement son rôle, car une seule fausse note met en péril l'ensemble de la partition.

Il s'agit donc du premier défi que François Hollande doit affronter: malgré les qualités de Jean-Marc Ayrault, il pourrait, pour se préserver et espérer remontrer dans les sondages, se résoudre à changer de Premier ministre.

Des élections municipales à forte connotation nationale

En premier lieu, il est clair qu'avec son "pacte de responsabilité", le Président a donné un nouveau cap politique à son quinquennat, qui ne cadre plus avec les promesses de la campagne électorale. Il ne s'agit pas de porter un jugement sur ce changement de cap. Mais ce changement de politique ne s'est pas accompagné d'un changement d'équipe: lorsque, sur un terrain de sport, plusieurs membres d'une équipe sont sur la touche car ils ne cadrent plus avec la stratégie voulue par cette équipe, il faut accepter d'en changer et faire entrer du sang neuf, plus a même de mettre en œuvre cette stratégie. Il s'agit aussi de nommer un capitaine d'équipe qui soit respecté et dont l'autorité n'est pas foulée au pied tous les jours. Il faut aussi lui donner les moyens de son action.

En second lieu, les élections municipales, sans même attendre le second tour, ont d'ores et déjà déjoué toutes les analyses du Président et du Premier ministre, ainsi d'ailleurs que celles réalisées par les instituts de sondage.

Selon cette analyse, les élections municipales ne reflèteraient que des enjeux locaux.
Cette analyse s'est révélée en partie fausse: car si cela avait été le cas, le maire de Lyon eut été réélu au premier tour, ce qui n'a pas été le cas (il a même des difficultés dans le premier arrondissement où la liste dissidente de gauche la maire sortante devance celle soutenue par Gérard Collomb) et la liste de Patrick Menucci à Marseille aurait dû se situer à un rang très honorable au premier tour, enfin le Front national n'en serait pas à ce niveau de voix avec des alliances avec des listes divers-droite dans au moins deux communes.

Si donc les enjeux nationaux ont dominé en grande partie, il est clair que le président de la République ne peut pas rester inactif et il doit apporter une réponse d'envergure nationale à ce scrutin peu ordinaire.

À cet égard, un nouveau Premier ministre (femme ou homme) devrait avoir la capacité de remobiliser l'électorat de François Hollande tout en mettant en œuvre concrètement le nouveau pacte de responsabilité: il s'agit de la quadrature du cercle. La meilleure façon de montrer qu'il a entendu les électeurs serait certainement de nommer à Matignon une personnalité politique ayant obtenu l'adoubement du suffrage universel à l'occasion de ces élections municipales et capable de faire preuve à la fois de l'autorité et de la souplesse nécessaire pour conduire ce nouveau cap.

Nommer une personnalité uniquement à l'aune de sa popularité auprès des Français sans autre réelle signification politique pourrait n'être qu'un pis-aller de courte durée, surtout si l'espoir mis dans cette personne s'avérait sans fondement.
N'oublions pas également que le souci de tout président étant celui de sa réélection, il n'aurait pas intérêt à choisir une personnalité dont les orientations seraient trop conflictuelles par rapport aux autres courants de son électorat et du parti majoritaire.

Car le prochain test n'est pas loin : il s'agit des élections au Parlement européen le 25 mai prochain.

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