Il est trop simple de voir d'un côté le groupe des artistes et des techniciens du spectacle opposé aux odieux patrons, au méchant MEDEF. C'est ce qu'ont besoin de croire et de nous faire croire ceux qui clament que la culture est en danger. Le "Si vous ne nous aimez pas, sachez que nous ne vous aimons pas non plus" emprunté à Maurice Pialat par la fronde avignonnaise rappelle plutôt le "Mon ennemi, c'est la finance" d'un candidat à la présidentielle. On a vu le résultat. De la situation de la France à la SNCM corse, des comptes de l'UMP aux intermittents, des Bonnets rouges faces aux écolos, toutes ces histoires se ressemblent étrangement. C'est un joli conte de fées raconté à des enfants pour les endormir qui se transforme en cauchemar.
Chez les intermittents, la "grande famille du spectacle vivant" est sur le point d'exploser. Et c'est parce qu'ils l'ont bien compris que les Jean-Michel Ribes montent au créneau avec des slogans incantatoires et la main sur le cœur. Déjà, chez les techniciens, les "jaunes" sont montrés du doigt par la base. Entendez par là: ceux qui n'ont pas envie de casser leur outil de travail tout en étant solidaires du mouvement, qui bossent quand même par peur d'être remplacés et ceux qui ont tout à perdre et qui sont prêts à aller jusqu'au bout, dont l'unique tort a été de croire que le père Noël existait vraiment et que sa hotte était inépuisable tant qu'on était gentil et qu'on s'embrassait sur les deux joues en arrivant au travail.
Le divorce gronde entre les "créatifs" et un sous-prolétariat de la culture. D'un côté, ceux qui affichent des idées de gauche tout en tirant bien fort leur épingle du jeu, qui ont appris à manier le double voire le triple langage pour mener leur barque, à la fois idéalistes dans leur engagement et réalistes dans leurs intérêts. De l'autre, des petites mains à qui l'on a fait croire que la culture était un lieu où l'argent coulait à flots et qui était moins cruel qu'un autre. De beaux discours, un enthousiasme né dans les années Lang, des hommes politiques et des responsables locaux avides d'image ont entretenu l'illusion. Jusqu'au jour où il faut bien payer l'addition. Naturellement, ce sont les plus vulnérables qui trinquent. Et ce cochon de payant (nous tous) à qui l'on demande de payer davantage pour acheter la paix sociale, sauver les apparences et guérir la culpabilité née de petits arrangements entre amis.
À voir ces spectacles annulés et tout ce gâchis, à lire ces banderoles hideuses qui défendent l'esthétique, ces tracts à la langue pauvre qui soutiennent la culture, ces discours lourdingues qui prennent fait et cause pour la légèreté du divertissement, ces slogans univoques qui en appellent à la complexité de l'être, comment ne pas penser à La Cérémonie de Claude Chabrol. Ce moment tragique où des bourgeois charmants, ouverts et pleins de bonnes intentions se font tuer par deux pauvres filles attachantes et rigolotes, dont l'une est analphabète, alors qu'ils regardent une représentation de Don Giovanni.
Comme dans toute tragédie, il n'y a pas de coupable et pas d'innocent. Il y a juste un Créon qui rappelle un principe de réalité et des Antigone qui refusent de l'admettre. Et au milieu, des tas de gens tantôt furieux, tantôt compréhensifs, tantôt bien embêtés, qui ne savent pas quoi penser, qui savent bien qu'il va falloir payer, mais qui ne savent pas encore qui, quand et comment. Car nous sommes tous Créon, Antigone et Chœur antique impuissant, même si nous aimerions tant n'incarner qu'un seul personnage: celui de la victime innocente face à tant de haine et de brutalité.
Chez les intermittents, la "grande famille du spectacle vivant" est sur le point d'exploser. Et c'est parce qu'ils l'ont bien compris que les Jean-Michel Ribes montent au créneau avec des slogans incantatoires et la main sur le cœur. Déjà, chez les techniciens, les "jaunes" sont montrés du doigt par la base. Entendez par là: ceux qui n'ont pas envie de casser leur outil de travail tout en étant solidaires du mouvement, qui bossent quand même par peur d'être remplacés et ceux qui ont tout à perdre et qui sont prêts à aller jusqu'au bout, dont l'unique tort a été de croire que le père Noël existait vraiment et que sa hotte était inépuisable tant qu'on était gentil et qu'on s'embrassait sur les deux joues en arrivant au travail.
Le divorce gronde entre les "créatifs" et un sous-prolétariat de la culture. D'un côté, ceux qui affichent des idées de gauche tout en tirant bien fort leur épingle du jeu, qui ont appris à manier le double voire le triple langage pour mener leur barque, à la fois idéalistes dans leur engagement et réalistes dans leurs intérêts. De l'autre, des petites mains à qui l'on a fait croire que la culture était un lieu où l'argent coulait à flots et qui était moins cruel qu'un autre. De beaux discours, un enthousiasme né dans les années Lang, des hommes politiques et des responsables locaux avides d'image ont entretenu l'illusion. Jusqu'au jour où il faut bien payer l'addition. Naturellement, ce sont les plus vulnérables qui trinquent. Et ce cochon de payant (nous tous) à qui l'on demande de payer davantage pour acheter la paix sociale, sauver les apparences et guérir la culpabilité née de petits arrangements entre amis.
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Comme dans toute tragédie, il n'y a pas de coupable et pas d'innocent. Il y a juste un Créon qui rappelle un principe de réalité et des Antigone qui refusent de l'admettre. Et au milieu, des tas de gens tantôt furieux, tantôt compréhensifs, tantôt bien embêtés, qui ne savent pas quoi penser, qui savent bien qu'il va falloir payer, mais qui ne savent pas encore qui, quand et comment. Car nous sommes tous Créon, Antigone et Chœur antique impuissant, même si nous aimerions tant n'incarner qu'un seul personnage: celui de la victime innocente face à tant de haine et de brutalité.
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