Le danger, bien entendu, est de verser dans la victimisation. Alors, souvent, pour éviter de donner cette impression, se dire que l'on est solide comme un roc, que l'indifférence, aussi, est une arme, on se tait et on encaisse lorsque la haine et la bêtise pointent leur gros nez. Rude.
Le milieu professionnel dans lequel j'évolue (les brasseries parisiennes) n'est pas réputé pour son ouverture d'esprit. Les gonzes enchaînent les heures, se coltinent la faune exigeante et impatiente de la cité et n'ont guère le temps, à force de courir après les biffetons, d'avoir une vie privée. Dans ces conditions, ils n'ont une compréhension que très modérée pour celle des autres. "PD" est synonyme de "connard" ou "sous-homme" et, ma foi, à les écouter, ils en rencontrent beaucoup, des "connards" et des faibles, au fil de leur longue journée!
Leurs clichés sur l'homosexualité (horrible mot, y a pas à dire: on dirait le nom d'un virus ou quelque chose du genre) n'ont guère évolué depuis le début du XXème siècle. Michel Serrault et Ugo Tognazzi sont toujours fréquemment évoqués (non, je ne plaisante pas... Paris centre, 2014; j'imagine au fin fond de la province !) Autant dire que, moi, je ne m'épanche guère ni sur mes amours ni sur mes coups de cœur. Je ne suis ni bavard, donc, ni efféminé (car pour eux, c'est un critère de reconnaissance. Évidemment, voyons: un homo, c'est un gars qui voudrait être une femme, c'est connu, quand même !), je ne me frôle pas à mes collègues langue pendue, bouche baveuse et main baladeuse (un autre "signe" selon eux) et pourrais donc faire mes heures en me contentant d'entendre leurs blagues grasses et vulgaires. Mais, si leur radar est obsolète, arrive cependant toujours le moment où je me fais "démasquer".
"Démasquer" car, à force de slalomer entre ces mots orduriers, ces obstacles de mépris, ces barres de dégoût et ces barrières de sottise, arrive un moment où, sans s'en rendre compte, leurs attaques finissent par toucher leur cible et où on finit presque par culpabiliser d'être qui on est. - "T'as vu comme elle est bonne! Sérieux, j'la chope et... " Les clientes et les piétonnes, mon Dieu, si elles savaient toutes les positions qui leur sont promises, par ici! Elles en rougiraient (de gêne ou de plaisir, selon).
Je ne me raconte pas, certes mais, ne poussons pas trop loin la fumisterie: je ne fais pas semblant non plus. Non, je ne me retournerai pas sur cette mini-jupe en acquiesçant: - " Ah, ouais... Ah, ouais... ", non je ne jouerai pas à l'épagneul breton à l'arrêt devant une lapine remontant des toilettes; je ne participerai pas à vos séances d'onanisme verbales et communes (quelle ironie, pour des "vrais" mecs!). La suspicion arrive, les regards se font méfiants (ne crains rien, gros Dédé, même si je le voulais, je ne saurais comment escalader cette montagne de graisse qui ne t'empêche pourtant pas de te prendre pour un Cador de la drague!), les clichés ressurgissent du fond des âges, des peurs et les projections font ce qu'elles savent faire: elles se projettent subjectivement. Comme dans une famille corse ou bretonne, sans poser de question, voici dès lors les collègues qui prennent le parti de "faire comme si". Les 3 petits singes et, tout ira bien.
J'en viens à me demander si cette hypocrisie n'est pas encore plus violente que l'affrontement direct. Car, lorsque les lames re-pointent, on ne les voit plus venir. Le barman est papa. Il a envoyé de l'hôpital une photo du nouveau-né. Un collègue me la montre. - "T'as vu comme il est beau?" Face fripée et cramoisie, ouais. Ironique, je plaisante: - "Beau? On va lui laisser quelques semaines pour se remettre en place avant de se prononcer!" Le type ne rit pas, il se retourne et me jette: - "N'importe quoi! De toute façon, qu'est-ce que tu y connais, toi, à ce qui est naturel?" Puis, il s'éloigne, filant montrer son image de nourrisson à quelqu'un de plus fiable. Je ne l'ai pas vue venir, celle-là.
Finalement, je préfère presque lorsqu'ils restent premier degré... Malgré mes prétentions et ma carapace, les coups de griffe, en fait, n'en finissent jamais de faire ce pour quoi ils sont faits: mal.
Le milieu professionnel dans lequel j'évolue (les brasseries parisiennes) n'est pas réputé pour son ouverture d'esprit. Les gonzes enchaînent les heures, se coltinent la faune exigeante et impatiente de la cité et n'ont guère le temps, à force de courir après les biffetons, d'avoir une vie privée. Dans ces conditions, ils n'ont une compréhension que très modérée pour celle des autres. "PD" est synonyme de "connard" ou "sous-homme" et, ma foi, à les écouter, ils en rencontrent beaucoup, des "connards" et des faibles, au fil de leur longue journée!
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Leurs clichés sur l'homosexualité (horrible mot, y a pas à dire: on dirait le nom d'un virus ou quelque chose du genre) n'ont guère évolué depuis le début du XXème siècle. Michel Serrault et Ugo Tognazzi sont toujours fréquemment évoqués (non, je ne plaisante pas... Paris centre, 2014; j'imagine au fin fond de la province !) Autant dire que, moi, je ne m'épanche guère ni sur mes amours ni sur mes coups de cœur. Je ne suis ni bavard, donc, ni efféminé (car pour eux, c'est un critère de reconnaissance. Évidemment, voyons: un homo, c'est un gars qui voudrait être une femme, c'est connu, quand même !), je ne me frôle pas à mes collègues langue pendue, bouche baveuse et main baladeuse (un autre "signe" selon eux) et pourrais donc faire mes heures en me contentant d'entendre leurs blagues grasses et vulgaires. Mais, si leur radar est obsolète, arrive cependant toujours le moment où je me fais "démasquer".
"Démasquer" car, à force de slalomer entre ces mots orduriers, ces obstacles de mépris, ces barres de dégoût et ces barrières de sottise, arrive un moment où, sans s'en rendre compte, leurs attaques finissent par toucher leur cible et où on finit presque par culpabiliser d'être qui on est. - "T'as vu comme elle est bonne! Sérieux, j'la chope et... " Les clientes et les piétonnes, mon Dieu, si elles savaient toutes les positions qui leur sont promises, par ici! Elles en rougiraient (de gêne ou de plaisir, selon).
Je ne me raconte pas, certes mais, ne poussons pas trop loin la fumisterie: je ne fais pas semblant non plus. Non, je ne me retournerai pas sur cette mini-jupe en acquiesçant: - " Ah, ouais... Ah, ouais... ", non je ne jouerai pas à l'épagneul breton à l'arrêt devant une lapine remontant des toilettes; je ne participerai pas à vos séances d'onanisme verbales et communes (quelle ironie, pour des "vrais" mecs!). La suspicion arrive, les regards se font méfiants (ne crains rien, gros Dédé, même si je le voulais, je ne saurais comment escalader cette montagne de graisse qui ne t'empêche pourtant pas de te prendre pour un Cador de la drague!), les clichés ressurgissent du fond des âges, des peurs et les projections font ce qu'elles savent faire: elles se projettent subjectivement. Comme dans une famille corse ou bretonne, sans poser de question, voici dès lors les collègues qui prennent le parti de "faire comme si". Les 3 petits singes et, tout ira bien.
J'en viens à me demander si cette hypocrisie n'est pas encore plus violente que l'affrontement direct. Car, lorsque les lames re-pointent, on ne les voit plus venir. Le barman est papa. Il a envoyé de l'hôpital une photo du nouveau-né. Un collègue me la montre. - "T'as vu comme il est beau?" Face fripée et cramoisie, ouais. Ironique, je plaisante: - "Beau? On va lui laisser quelques semaines pour se remettre en place avant de se prononcer!" Le type ne rit pas, il se retourne et me jette: - "N'importe quoi! De toute façon, qu'est-ce que tu y connais, toi, à ce qui est naturel?" Puis, il s'éloigne, filant montrer son image de nourrisson à quelqu'un de plus fiable. Je ne l'ai pas vue venir, celle-là.
Finalement, je préfère presque lorsqu'ils restent premier degré... Malgré mes prétentions et ma carapace, les coups de griffe, en fait, n'en finissent jamais de faire ce pour quoi ils sont faits: mal.
Frédéric L'Helgoualch est également publié sur le site littéraire La Revue des Ressources
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