Dans Mafiosa, Tony Soprano s'appelle Sandra Paoli. Cette série qui explose les tabous et les codes de la fiction française formatée, fédératrice, est en cinquième et dernière saison sur Canal+. Mafiosa est l'emblème d'un certain renouveau de la série française, celle qui annonce la Nouvelle Vague.
Depuis Police District sur M6 en 1998, on n'avait pas revu une série française de cette pointure. Elle s'appelle Mafiosa. Pas de hasard. Entre l'une - paris police blues -, et l'autre - un clan mafieux -, il y a Hugues Pagan à l'écriture du scénario. Cet ancien policier, comme son collègue et ami, Olivier Marchal (acteur dans Police District avant de réaliser ses polars au cinéma) connaît bien le tempo, balance bien les flics et les voyous. C'est du réel, du vécu. Pas du sentimental foule, du happy end, Julie Lescaut et Navarro au pays de Candy.
Voir Mafiosa pour la première fois (12 décembre 2006 sur Canal+) c'est assister à l'arrivée d'un ovni, l'avènement d'une nouvelle génération de séries ancrées dans la réalité qui tourne le dos à la traditionnelle fiction française formatée, fédératrice et ses héros consensuels.
Justement, Sandra Paoli est tout sauf consensuelle.
D'abord, c'est une femme et au pays de la télévision, on dit "héros", pas "héroïne". Mafiosa brise un tabou: alors que Phèdre et Médée n'ont pas la cote ni d'un côté, ni de l'autre de l'Atlantique et de la Manche, les Français les premiers (Glenn Close viendra plus tard dans Damages) ont osé la "méchante héroïne". Ils ont fait pire. Ici, Tony Soprano s'appelle Sandra Paoli. Un second tabou, improbable, vole en éclat: Sandra est le cerveau de la famille, du clan mafieux. Elle succède à son oncle qui vient de se faire buter par la pègre locale. Une femme, marraine de la corsica mafia, jamais! Impossible, selon les Corses. Impossible n'est pas Français, on le sait. Ainsi bascule la vie de Sandra Paoli de l'autre côté de la barrière, dans le grand banditisme au pays des machos.
Au fil des épisodes, le personnage révèle sa part sombre, superbement ambiguë, rongée de l'intérieur. La fleur bleue se révèle vénéneuse. L'héroïne aux mains sales découvre cette testostérone en elle. La femme et le démon. Un alliage explosif. Télégénique. Le pouvoir de séduction de Sandra Paoli est d'une efficacité redoutable. C'est là où Mafiosa frappe fort, gagne son pari, nous emporte dans un grand souffle dramatique, une saga noire et violente. Polar et familia! Avec un casting impeccable, sans dinosaures du cinéma français Hélène Fillières est une révélation. On découvrira -avant qu'ils ne meurent... ou pas - Thierry Neuvic (le frère), Fabrizio Rongione (Rémi Andreani) et Reda Kated (petits amis d'aventure). On croisera Joey Starr, Jean-Pierre Kalfon et ceux qui sont morts dans la vraie vie: Daniel Duval et Frédéric Graziani (à qui cette 5e saison est dédiée).
Le fond, mais aussi la forme. Pas simple quand les scénaristes et les réalisateurs se suivent et ne se ressemblent pas. Mafiosa explose les codes de la fiction française. Se suivront aussi les scénaristes et les réalisateurs. Le premier à s'y coller sera le Québécois Louis Chouquette. Réalisation esthétique, stylisée et brute de décoffrage. Furieusement moderne. Dans Mafiosa, on voit, plein écran, un œil à l'affût, un frémissement de lèvres. On cadre la moitié d'un visage, un décalage qui amplifie l'intensité. Comme une photo dont le sujet décentré est en équilibre fragile, au bord du bord, à la limite de l'impossible, de l'interdit. Bordeline.
D'emblée, cette série haut de gamme a conquis un public, séduit le cinéaste Eric Rochant (Un monde sans pitié, Les patriotes) qui a écrit et réalisé les saisons 2 et 3. Pas les meilleures. Trop sobres, trop académiques. Son second souffle, Mafiosa le retrouvera avec Pierre Leccia, co-scénariste sous Rochant. La réalisation, nerveuse, pulse, rythme l'action, retrouve sa modernité. De la castagne comme dans Breaking Bad. Ainsi, pendant cinq saisons, la série aura eu plusieurs vies, se sera transformée au fil des réalisateurs. Ses personnages auront évolué. Sandra Paoli, désormais le cheveux coupé, garçonne. Plus elle est mafiosa, plus elle est androgyne.
La fin de Mafiosa marque une époque. Après La Commune et Reporters qui n'avaient pas trouvé leur public, Mafiosa sera la première série originale de Canal+ à connaître de belles audiences, des aficionados. Suivront d'autres succès: Engrenages, Braquo, Tunnel, Les Revenants. Pas de doute, la palme revient aux Revenants et à Mafiosa et Les Revenants. Tellement originales, tellement ambitieuses.
Depuis Police District sur M6 en 1998, on n'avait pas revu une série française de cette pointure. Elle s'appelle Mafiosa. Pas de hasard. Entre l'une - paris police blues -, et l'autre - un clan mafieux -, il y a Hugues Pagan à l'écriture du scénario. Cet ancien policier, comme son collègue et ami, Olivier Marchal (acteur dans Police District avant de réaliser ses polars au cinéma) connaît bien le tempo, balance bien les flics et les voyous. C'est du réel, du vécu. Pas du sentimental foule, du happy end, Julie Lescaut et Navarro au pays de Candy.
Voir Mafiosa pour la première fois (12 décembre 2006 sur Canal+) c'est assister à l'arrivée d'un ovni, l'avènement d'une nouvelle génération de séries ancrées dans la réalité qui tourne le dos à la traditionnelle fiction française formatée, fédératrice et ses héros consensuels.
Justement, Sandra Paoli est tout sauf consensuelle.
D'abord, c'est une femme et au pays de la télévision, on dit "héros", pas "héroïne". Mafiosa brise un tabou: alors que Phèdre et Médée n'ont pas la cote ni d'un côté, ni de l'autre de l'Atlantique et de la Manche, les Français les premiers (Glenn Close viendra plus tard dans Damages) ont osé la "méchante héroïne". Ils ont fait pire. Ici, Tony Soprano s'appelle Sandra Paoli. Un second tabou, improbable, vole en éclat: Sandra est le cerveau de la famille, du clan mafieux. Elle succède à son oncle qui vient de se faire buter par la pègre locale. Une femme, marraine de la corsica mafia, jamais! Impossible, selon les Corses. Impossible n'est pas Français, on le sait. Ainsi bascule la vie de Sandra Paoli de l'autre côté de la barrière, dans le grand banditisme au pays des machos.
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Au fil des épisodes, le personnage révèle sa part sombre, superbement ambiguë, rongée de l'intérieur. La fleur bleue se révèle vénéneuse. L'héroïne aux mains sales découvre cette testostérone en elle. La femme et le démon. Un alliage explosif. Télégénique. Le pouvoir de séduction de Sandra Paoli est d'une efficacité redoutable. C'est là où Mafiosa frappe fort, gagne son pari, nous emporte dans un grand souffle dramatique, une saga noire et violente. Polar et familia! Avec un casting impeccable, sans dinosaures du cinéma français Hélène Fillières est une révélation. On découvrira -avant qu'ils ne meurent... ou pas - Thierry Neuvic (le frère), Fabrizio Rongione (Rémi Andreani) et Reda Kated (petits amis d'aventure). On croisera Joey Starr, Jean-Pierre Kalfon et ceux qui sont morts dans la vraie vie: Daniel Duval et Frédéric Graziani (à qui cette 5e saison est dédiée).
Le fond, mais aussi la forme. Pas simple quand les scénaristes et les réalisateurs se suivent et ne se ressemblent pas. Mafiosa explose les codes de la fiction française. Se suivront aussi les scénaristes et les réalisateurs. Le premier à s'y coller sera le Québécois Louis Chouquette. Réalisation esthétique, stylisée et brute de décoffrage. Furieusement moderne. Dans Mafiosa, on voit, plein écran, un œil à l'affût, un frémissement de lèvres. On cadre la moitié d'un visage, un décalage qui amplifie l'intensité. Comme une photo dont le sujet décentré est en équilibre fragile, au bord du bord, à la limite de l'impossible, de l'interdit. Bordeline.
D'emblée, cette série haut de gamme a conquis un public, séduit le cinéaste Eric Rochant (Un monde sans pitié, Les patriotes) qui a écrit et réalisé les saisons 2 et 3. Pas les meilleures. Trop sobres, trop académiques. Son second souffle, Mafiosa le retrouvera avec Pierre Leccia, co-scénariste sous Rochant. La réalisation, nerveuse, pulse, rythme l'action, retrouve sa modernité. De la castagne comme dans Breaking Bad. Ainsi, pendant cinq saisons, la série aura eu plusieurs vies, se sera transformée au fil des réalisateurs. Ses personnages auront évolué. Sandra Paoli, désormais le cheveux coupé, garçonne. Plus elle est mafiosa, plus elle est androgyne.
La fin de Mafiosa marque une époque. Après La Commune et Reporters qui n'avaient pas trouvé leur public, Mafiosa sera la première série originale de Canal+ à connaître de belles audiences, des aficionados. Suivront d'autres succès: Engrenages, Braquo, Tunnel, Les Revenants. Pas de doute, la palme revient aux Revenants et à Mafiosa et Les Revenants. Tellement originales, tellement ambitieuses.
Mafiosa, saison 5, lundi, 20h50, Canal+. Mardi, 20h50, Canal Décalé.
L'intégrale de la saison 5 sur Canal+ à la demande, lundi soir.
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